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L’énergie suisse à la croisée des chemins : Décryptage du Rendez-vous de l’énergie 2025

Le Rendez-vous de l’énergie a réuni des experts suisses et européens pour analyser les changements qui attendent le marché électrique suisse. Au cœur des débats : l’Accord sur l’électricité UE-CH et ses implications directes pour la souveraineté, la sécurité d’approvisionnement et l’avenir des Gestionnaires de Réseau de Distribution (GRDs) helvétiques.

L’Accord UE-CH : Stabilité juridique et sécurité d’approvisionnement

Guillaume Cassaigneau, Ambassador, Head of International Energy Affairs (OFEN), a tout d’abord posé les bases de la dépendance énergétique suisse. L’accord, dont la négociation a été close en décembre 2023, est perçu par l’OFEN comme un pas vers une stabilité juridique accrue et un gain de souveraineté grâce à l’établissement d’un tribunal arbitral pour le règlement des différends.

Un point de friction majeur est l’ouverture progressive du marché de détail. Elle est jugée indispensable par l’UE pour optimiser le marché de gros, mais vue comme une concession majeure du côté Suisse.

Les GRDs face à la libéralisation : Enjeux opérationnels et financiers

L’ouverture du marché, prévue au plus tôt le 1er janvier 2028, affectera principalement les GRDs. Laurent Balsinger, Président de Multidis, a détaillé l’obligation de séparation des activités (distribution et fourniture), ainsi que les défis liés à la gestion de l’approvisionnement de base pour les petits consommateurs (< 50’000 kWh).

Les GRDs craignent une érosion des marges, déjà très réduites en Suisse comparées à l’Europe (parfois deux ou trois fois moins qu’en Allemagne), et l’incertitude sur les volumes de l’approvisionnement de base. Comment un GRD peut-il acheter de l’énergie plusieurs années à l’avance quand les clients conservent la liberté de changer de fournisseur d’année en année ? Cette incertitude crée une certaine complexité dans la gestion des risques.

Le miroir allemand : Mythes et réalités de la concurrence

Stephan Krieger, ancien représentant du BDEW, a offert un retour d’expérience précieux sur l’ouverture du marché allemand, initiée en 1998 pour contrer l’inertie des monopoles territoriaux.

Malgré les prévisions initiales annonçant la consolidation à seulement 5 à 8 acteurs, le nombre de gestionnaires de réseau est resté stable (plus de 800 entreprises). La concurrence, cependant, n’agit que sur une petite partie de la facture finale, le reste étant dominé par les taxes et frais de réseau. L’activité reste élevée : 9 millions de changements de fournisseurs ou de contrats renouvelés ont été enregistrés en 2023.

En conclusion, la libéralisation a-t-elle fait baisser les prix pour le petit consommateur ? La réponse est nuancée. Et l’exemple allemand montre que le développement des énergies renouvelables ne peut pas se reposer uniquement sur la loi du marché et nécessite des mécanismes de soutien adaptés en complément.

L’intermède humoristique : La Résistance Suisse

L’humoriste Charles-Édouard a apporté une touche de légèreté, exprimant la confusion du citoyen face à la complexité des acronymes et des règles juridiques. Il a ironisé sur les relations Suisse-UE, suggérant que la tendance suisse à toujours « vouloir s’isoler » ne fait que générer une « résistance » électrique.

Table ronde : Consensus, complexité et protection du client

Modérée par Gaëtan Cherix, la table ronde a confronté l’OFEN, les GRDs (Multidis et Oiken), les politiques (Conseil national) et la protection du consommateur (FRC).

Les thèmes abordés furent :

  • La souveraineté : Est-ce que la Suisse a perdu son influence sans l’accord, malgré son réseau physique central ?
  • La protection du consommateur : La FRC soutient l’ouverture, à condition de mettre en place des garde-fous : une régulation claire, une transparence totale des offres, un comparateur neutre et des mécanismes pour sanctionner les abus, comme le démarchage agressif.
  • Les GRDs : Sont-ils prêts ? La nouvelle réalité exigera une professionnalisation des Conseils d’administration pour la gestion des risques. (En cas de faillite d’un fournisseur, l’expérience allemande rassure, car dans ce cas le client retombe automatiquement dans l’approvisionnement de base pour trois mois.)
  • Les énergies renouvelables : Il a été confirmé que l’accord n’impose aucune privatisation des ouvrages hydrauliques. La promotion des énergies renouvelables, même dans un marché ouvert, est possible via des mécanismes comme la prime de marché flottante, jugée compatible avec l’accord.

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